La recherche pré-clinique
La recherche médicale sur les maladies rares implique de nombreux acteurs, aux compétences très différentes. Les différentes étapes qui mènent à la commercialisation d'un traitement sont complexes, mais bien établies.
Cette page, mise à jour régulièrement, présente l'étape de la recherche pré-clinique, où il s'agit pour les scientifiques de comprendre la maladie, ses mécanismes, et ses effets sur l'organisme. Comme nous l'avons présenté dans la page résumant les étapes de la recherche scientifique, ces étapes de recherche fondamentales sont indispensables à la compréhension de la maladie, pour pouvoir ensuite construire une recherche clinique adaptée.
La recherche de thérapies se structure en plusieurs étapes distinctes, depuis la recherche pré-clinique jusqu'à la commercialisation d'un traitement. En utilisant le tableau ci-joint, vous trouverez de l'information sur chacune des étapes.
Comment étudie-t-on la maladie ?
Pour comprendre comment soigner efficacement une maladie, il faut d'abord l'étudier. C'est l'activité principale des scientifiques, pour qui les maladies CLN sont un sujet récent d'étude. L'amélioration des techniques, et le temps passé à étudier ces maladies permet d'améliorer la compréhension que les scientifiques en ont.
Ainsi, les voies d'expression des gènes (ou pathways en anglais) est sont un sujet d'étude central, pour lequel il existe encore de nombreuses questions encore ouvertes. Il s'agit ici de retracer l'effet d'un gène, depuis sa traduction sous forme d'ARN, puis la production de la protéine associée, et enfin d'étudier l'ensemble des utilisations qui sont faites de cette protéine à travers les cellules du corps humain. Cette utilisation peut être différente suivant l'organe ou le tissu, car d'autres gènes peuvent venir influencer son usage.
Identification du gène
L'une des étapes essentielles de cette étude des voies d'expression a été d'identifier les gènes en cause dans chacune des variantes de la maladie. Le tableau ci-dessous donne les années d'identification pour les variantes connues.
CLN1 | CLN2 | CLN3 | CLN4 | CLN5 | CLN6 | CLN7 | CLN8 | CLN10 | CLN11 | CLN12 | CLN13 | CLN14 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
1995 | 1997 | 1995 | 2011 | 1998 | 2002 | 2007 | 1999 | 2006 | 2012 | 2012 | 2012 | 2012 |
Source : Sara E. Mole, Ruth E. Williams, Hans H. Goebel, The Neuronal Ceroid Lipofuscinoses (Batten Disease), second edition, 2011.
Des modèles adaptés
Afin d'étudier ces voies d'expression des gènes, ou encore mesurer l'efficacité d'un possible traitement thérapeutique, les scientifiques utilisent des modèles non humains pendant la phase pré-clinique (voir plus haut). Ces modèles peuvent être de plusieurs type :
- Les chercheurs peuvent étudier les voies d'expression directement dans des cellules humaines qu'ils auront auparavant prélevées.
- Une autre approche consiste à construire un modèle simple à partir d'être unicellulaires tels que les levures, chez qui on peut reproduire les maladies étudiées, par une mutation génétique. L'avantage de ce modèle est que le cycle de vie est très rapide, que c'est un modèle peu cher à fabriquer et à étudier, et qu'il est facile de mesurer des propriétés à l'échelle chimique.
- On peut aussi choisir des modèles utilisant de petits animaux comme les poisson-zèbre ou les souris, qui ont l'avantage d'avoir aussi un cycle de vie plutôt rapide. On gagne ici en complexité, et on peut étudier des aspects plus complexes de la maladie, liés au fonctionnement des organes.
- Enfin, certaines équipes utilisent des modèles animaux plus complets, tel que les chiens ou les moutons. La grande complexité des organes de ces animaux permettent d'étudier des aspects plus proches des symptômes présents chez les humains. Cependant, leurs cycles de vie plus longs rendent parfois moins rapide la progression de la recherche.
Quel que soit le modèle choisi, il faut qu'il soit adapté à l'étude d'une maladie en particulier. Une activité importante dans la recherche sur les maladies CLN consiste donc à concevoir des modèles qui soient porteurs de la maladie à étudier. C'est une problématique qui est toujours d'actualité en 2017. Les différents modèles cités plus haut (tissus cellulaires humains, levures, poisson-zèbre, souris, chiens, moutons) sont aujourd'hui utilisés ou développés dans les laboratoires de recherche travaillant sur les CLN.
Des outils pour mesurer la maladie
Il existe une grande variété d'outils permettant de mesurer les conséquences de la maladie sur les modèles choisis : analyse de l'ADN, mesures de propriétés chimiques ou biologiques au cœur des cellules, étude du développement des cellules, ou à une plus grosse échelle des organes... Chacune de ces approches correspond à une compétence scientifique spécifique, certains laboratoires étant plus ou moins spécialisés dans l'une ou l'autre des approches.
Il est important de comprendre que ces approches sont complémentaires, et que les résultats des uns permettent aux autres d'ajuster leurs approches. Les publications scientifiques, soit dans des journaux spécialisés, soit à l'occasion de conférences, sont l'occasion pour les chercheurs de partager leurs résultats, et de prendre connaissance des explorations des autres équipes.
Quelques chercheurs francophones
Voici quelques noms de chercheurs ayant travaillé sur la maladie de Batten, ou sur des sujets proches, et qui sont francophones :
- Stéphane Lefrançois, de l'Institut Armand-Frappier (INRS, Laval), qui travaille en biologie cellulaire ;
- Bruno Gasnier, co-directeur du laboratoire Neurophononics (CNRS, Université Paris Descartes), et membre du conseil scientifique et médical de l'association Vaincre les Maladies Lysosomales ;
- Thierry Levade, membre de l' Institut Fédératif de Biologie (Toulouse), qui travaille plutôt sur la maladie de Farber ;
- Jean-Michel Verdier, directeur du laboratoire « Mécanismes Moléculaires dans les Démences Neurodégénératives » (MMDN, UMR_S 1198 Inserm/Université de Montpellier/EPHE) ;
- Marie Vanier, aujourd'hui à la retraite.
Pour aller plus loin
Cette page n'est pas exhaustive, ni nécessairement à jour. Pour suivre l'actualité de la recherche sur les CLN, voici plusieurs pistes intéressantes :
- La conférence internationale sur les CLN, qui se tenait en 2016 à Boston (NCL Boston 2016) et en 2018 à Londres. Il s'agit du principal rendez-vous des chercheurs sur la maladie de Batten, qui a lieu une fois tous les deux ans, en alternance à Londres et à Boston.
- NCL Resource - A gateway for Batten disease, un site très complet, maintenu par l'équipe de Sara Mole, qui se veut être un portail vers toutes les informations autour de CLN. Il est à destination des cliniciens, des familles, des chercheurs, et de toute personne intéressée à la maladie de Batten.
- NCL Net, un site d'information au sujet de CLN, pour les patients, les parents et les médecins, créée par une équipe allemande.
- La lettre d'information de NCL-Stiftung, en langue anglaise et allemande, paraît régulièrement sur le site de la fondation. Dans cette lettre, on retrouve l'actualité de la recherche sur la maladie de Batten : articles, conférences à venir, financements de nouveaux projets, etc.
Parmi les événements intéressants à venir, on peut aussi citer la première conférence internationale sur l'éducation pour les porteurs de la maladie de Batten, en 2018 à Örebro (Suède).